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Nona Mariotti
Pleins feux sur le conseil communautaire
6 juin 2023.
Nona Mariotti vit dans le comté rural de Frontenac et nous a parlé de son point de vue sur le vieillissement, des programmes et des activités pour les personnes âgées de la région et de ce qui les a motivées à s'impliquer auprès de l'ESO FLA.
Dans ses propre mots
Je suis née à Kingston il y a 78 ans, mais j’ai passé la majorité de ma vie d’adulte à Toronto, où j’ai élevé trois enfants, bâti une carrière dans l’enseignement et pris ma retraite comme directrice d’une école primaire. L’une de mes grands-mères me disait souvent : « Grâce au Seigneur, tu as deux mains, Nona : l’une qui te tire vers l’avant et l’autre que tu peux tendre vers l’arrière pour aider quelqu’un d’autre à avancer. »
J’ignorais que, dans mes vieux jours, je devrais appliquer cet adage pour aider mon mari que j’avais épousé il y a 58 ans. En traversant ce chemin ensemble, d’un mauvais diagnostic de la maladie de Parkinson à une hydrocéphalie à pression normale [avec une démence du lobe frontal à ce moment-là], nous deux, nos enfants adultes, nos petits-enfants et nos amis en avons beaucoup appris.
Il y a treize ans, mon mari et moi avons dû nous frayer un chemin dans un système de soins de santé en difficulté dont nous ignorions les moindres remparts. Nous avons généralement constaté que l’« âge » était une question omniprésente, posée par la plupart des acteurs du système, malgré le fait que nous étions tous deux physiquement actifs : nous pratiquions toujours le curling, jouions au golf, et faisions du vélo, du ski [alpin et de fond], de la raquette et de la natation. Au fil des années, l’équipe de médecins de mon mari est passée de six à une personne. C’est notre médecin de famille qui nous est venu en aide, a posé un diagnostic et nous a aidés à planifier les quatre dernières années et quelques de notre vie.
Mon expérience en tant qu’aidante naturelle
Mon expérience en tant qu’aidante naturelle est en constante évolution et est marquée par de nombreux défis. Avant que mon mari ne se retrouve en fauteuil roulant, incontinent et incapable de communiquer, nous participions aux exercices hebdomadaires destinés aux patients atteints de Parkinson à Sainte-Elisabeth. Nous nous sommes immergés dans les services communautaires du sud de Frontenac et avons pris part à des cours d’exercices, à des activités culturelles, à des spectacles de musique, voire à des collectes de fonds. Mon mari nécessitait de plus en plus d’aide. Il a donc été pris en charge dans le cadre d’un programme de jour destiné aux aînés au Grace Centre. C’était une bonne chose pour lui et moi, car je pouvais consacrer du temps à mes propres besoins. Nous avons même conservé [jusqu’en janvier 2020] nos billets de théâtre Mirvish [membres depuis plus de 30 ans] à Toronto. Notre passion pour le théâtre et la musique, ainsi que la possibilité de rendre visite à des amis à Toronto, nous a énormément motivés.
Trouver de l’aide et du soutien
Les recherches révèlent que les aînés souhaitent rester chez eux, ce qui est possible dans les systèmes de santé d’autres pays. En d’autres termes, nous avons besoin des soutiens à domicile en tant qu’aidants naturels. Pourquoi devons-nous donc nous acharner, voire mendier, pour obtenir ces services qui ne sont pas toujours de la meilleure qualité? La plupart du temps, la prestation de soins envahit notre corps, notre mode de vie et notre fonctionnement au quotidien. Pendant toute la période de ces services, une préposée aux services de soutien à la personne répétait à mon mari italien, âgé de 80 ans, qu’il était un bon garçon. La rotation du personnel, les délais de service ou les absences répétées rendent cette expérience malsaine pour toute personne souffrant de troubles cognitifs.
Le format des soins prodigués à domicile ne fait qu’exacerber les problèmes de l’aidant naturel, ainsi que de ceux de la personne qui a besoin de ces soins. Qui veut que plusieurs personnes leur lavent le corps, nettoient leurs parties intimes, etc.? Et puis, différentes personnes se présentent chaque jour. Je dois donc leur donner des instructions de nouveau et les aider, car beaucoup d’entre elles sont incapables d’utiliser des palans ou certains équipements. J’ai la chance de pouvoir trouver ces gens et de pouvoir les aider, mais beaucoup ne sont pas en mesure de le faire. Certes, j’ai choisi de vivre dans une zone rurale, mais je paie quand même des impôts et je soutiens le système de soins de santé.
Vivre en milieu rural et vieillir chez soi
Nous avons tous entendu dire qu’on ressent la solitude, même au milieu d’une foule, et que celle-ci se concrétise lorsque l’on doit composer avec les conséquences d’un événement physique démoralisant loin de ses proches. Cependant, la cohésion du tissu rural permet de faire face à la solitude chronique. Les paroisses et les écoles sont à l’écoute des besoins de leurs fidèles, et les soutiennent en leur offrant des activités religieuses et éducatives ainsi que des cours de yoga et d’exercices physiques, des expériences musicales et des expériences intergénérationnelles. Là encore, ces communautés nouent des liens avec d’autres organismes pour proposer des activités éclectiques qui permettent aux personnes de bien vieillir chez elles.
Il est parfois possible d’atténuer la solitude quelque peu grâce à la visite quotidienne d’un préposé aux services de soutien à la personne qui aide les partenaires soignants à prendre soin du membre de leur famille. Il est très difficile de trouver des préposés qui sont prêts à se rendre régulièrement à domicile dans les zones rurales. Plusieurs d’entre eux craignent de sortir des limites d’une grande ville comme Kingston, car cela nécessite plus de temps et un effort pour conduire, ce qui les oblige souvent à se dépêcher et à faire des heures supplémentaires. À moins d’obtenir des services privés [et ils sont difficiles à trouver], le personnel manque de constance, et le client en fait les frais. Nous avons eu 15 préposés aux services de soutien à la personne dans 17 créneaux horaires.
Vieillir à l’ère de la technologie
Je crois qu’on ne peut pas parler du vieillissement sans prendre acte de nos efforts pour apprendre et rester à la pointe de la technologie. Certes, les téléphones cellulaires, les tablettes et les ordinateurs ont créé et continuent de créer des courbes d’apprentissage rudes pour tout le monde, mais surtout pour les aînés. Malheureusement, un grand nombre des aînés vivant dans des zones rurales tentent de se familiariser avec la technologie et ne réussissent pas en raison du manque de fournisseurs de services dans la région. Trop souvent, s’ils ont besoin d’un service Internet, le coût est trop élevé pour ces personnes dont le revenu fixe ne suffit pas. Cette réalité entrave les interactions entre ces personnes et leurs programmes, ainsi que leurs familles, ou les empêche de participer à des cours de formation et de soutien en ligne.
Motifs de mon bénévolat et du partage de mes expériences avec l’ÉSO FLA
Je me suis jointe aux comités de l’ÉSO FLA dans l’espoir de les renseigner sur ce qui se passe et ce qui ne se passe pas dans les régions rurales. Nous, les aînés, avons besoin d’aide.
À la suite de ces 14 ans, j’ai souhaité me porter volontaire pour faire partie de comités concernés par la révision de notre système de soins de santé. Je parle la langue, je dispose d’un filet de sécurité financier, j’ai le soutien de ma famille, je peux compter sur un excellent médecin de famille et je suis en bonne santé. Pourtant, beaucoup de gens ici, dans la région rurale de Frontenac, n’ont pas accès à ces choses, entre autres. J’estime que mon expérience limitée leur permettra de se présenter, en mettant en lumière et en réglant les problèmes dont il est question.